Le titre est très démagogique, à la mesure de mon personnage se voulant éveilleur de conscience... la belle afaire. J'interpellle Olivier Besancenot, je vous donne la réponse dès qu'elle arrive.
A l’attention d’Olivier Besancenot, candidat à l’élection présidentielle de 2007.
Je ne respecterais certainement pas ici les formes traditionnelles de la lettre et je vous prie d’avance d’excuser cette déviance même si pour ma défense, à l’âge de 18ans il est bien rare d’en maîtriser la forme. Aussi serais-je un peu brouillon et c’est pourquoi je lance ici cet avertissement pour vous inciter à ne pas abandonner immédiatement la lecture.
Laisser moi tout d’abord, avant de vous poser quelques questions, vous permettre de visualiser ma sensibilité politique par ces quelques précisions :
Ma grand mère, qui va voter pour vous, était ouvrière et travaillait à la biscuiterie LU, mon grand père lui était artisan peintre modeste et tout deux ont toujours vécu à Saint-Martin-d'Hères, commune iséroise profondément communiste… autant vous dire que j’avais quelques prédispositions pour me tourner vers la gauche de la gauche. Je suis par ailleurs né le même jour que François Mitterrand, le premier président que j’ai connu, anecdote qui a facilité d’autant plus mon intérêt pour la politique. Etant très dogmatique plus « jeune », j’en venait presque à défendre l’indéfendable URSS. Il faut dire que le communisme faisait alors parti de mon identité et la boule au ventre je méprisais la complaisance envers les Etats-Unis de mes professeurs d’histoire. Et puis j’ai étudié l’humanisme, les libertaires, les anarchistes, les penseurs socialistes et enfin la vertueuse philosophie…
Tous ces héritages m’ont beaucoup influencé et je suis devenu « militant » d’une démocratie sans représentants, localisée, s’inspirant de l’antique modèle athénien. On peut appeler cela la République de quartier… enfin je ne vous apprends rien. Pendant les blocages lors de la crise du CPE, avec d’autres lycéens nous avons réfléchi sur l’économie et sur le projet de relocaliser les entreprises qui désormais se fonderaient sur une matrice démocratique (longue paraphrase pour désigner les autogestions). Etant habitants de Romans sur Isère (Drôme) et constatant avec consternation la disparition de l’industrie qui faisait la renommée de notre ville (Kélian, Jourdan), nous avons pensé l’économie relocalisée et artisanale pour redonner du sens au travail. Toutes nos Idées risquent fort d’être bouleversées lorsque nous aurons fait un détour par le monde de l’entreprise… Bref. Par la suite, l’essoufflement du mouvement n’a pas entraîné d’action concrète de notre assemblée mais les Idées sont restées et nous sommes nombreux encore à être convaincu par cette politique ambitieuse. Aussi, si aujourd’hui je prépare le concours de Sciences-Pô Grenoble c’est pour mieux préparer mon projet qui pour cet instant T de ma réflexion s’inscrit dans un mouvement d’autonomisation complète de la commune. Voilà le succinct tour d’horizon de ma pensée qui établit simplement un cadre grossier pour mieux rendre incompréhensible ma décision quasi définitive de voter pour Ségolène Royal.
Pourquoi elle ? En gros vous donner ma voix ne me satisfait guère puisque vous avez une façon assez autoritaire de concevoir la politique ; pas autant que ces passéistes de la Lutte ouvrière, grands admirateurs de feu Lénine qui dans son grand respect du processus démocratique empêcha rapidement l’autonomie des soviets (démarche semblable à la reprise en main du mouvement communale de la Révolution Française par un pouvoir centralisateur qui ne souffrait pas une indépendance locale). Mais là encore je ne vous apprends rien. Il se trouve qu’à Grenoble devant le grand lycée Champollion là où je poursuis mes études il y a souvent un « prêtre » de la LO qui est tout heureux de me traiter d’anarchiste, ce dont je ne me revendique en rien, quand je préférerais qu’il me donne une vraie réponse à ma question. Et je vous la pose à vous aussi puisque votre site Internet indique que mon message vous sera remis et je mise aussi sur votre apparente proximité avec le peuple: Pourquoi quatre candidats de même sensibilité à l’élection présidentielle ? Pour prévenir tout oscillation de sourcil, je dirais que je n’ai nullement annoncé de l’originalité dans mon discours. Mais avouez tout de même que devant la stupidité, a priori, de cette situation j’étais en droit de me poser cette question ; mais c’est que je dois être le plus mal renseigné du monde. Je suis tout de même face à une situation pour le moins cocasse : C’est la première fois que je vais voter et il y a quatre candidats dont les opinions se rapprochent les plus des miennes. Qui c-h-o-i-s-i-r ?
Arlette Laguiller qui au lieu d’appeler à la grève générale en 2002 a trouver plus utile d’appeler à l’inaction et à l’abstention ?
Marie George Buffet qui s’est assurée de placer une majorité de communistes dans les collectifs antilibéraux, tronquant ici le choix du candidat unitaire et se présentant avec l’aide de la puissance du parti communiste ?
José Bové quelque peu arriviste qui estime que trois candidats identiques ne suffisent certainement pas au débat et qui, enivré par les joies d’Internet a fantasmé sa possible percée à l’élection présidentielle ?
Enfin pour vous Olivier, 100% à gauche, qui ne semblait décidément pas très enclin à un mouvement unitaire des antilibéraux et tenants courageux du non au TCE ?
Je comprends que vous ayez des partis différents avec des logiques, des ego (a priori), des histoires, des ambitions différentes mais votre électorat… ne vous comprend plus. Comment entendre en effet pour un ouvrier que leurs représentants ne semblent pas intéressés par le pouvoir. Voulez vous vraiment gouverner ? Vous avez pourtant les ressources, et je ne parlerais pas de chiffres ou de sondages, pour peser dans la campagne et être la troisième voir la deuxième force. Ne répliquez pas par l’argument de l’utopisme ou de l’irréalisme de ma part et n’utilisez pas alors les qualificatifs que vos froids adversaires expriment à votre égard.
Mais le discours que je suis en train de vous tenir, je l’espère fermement, est celui d’un ignorant versant dans la cuistrerie et les préjugés, et merci alors de rétablir la vérité sur la véritable nature de la dispersion de la gauche de la gauche.
Voilà pourquoi je suis assez désabusé par ces partis, dont la logique actuelle me semble répondre à une logique législative et non pas présidentielle où c’est avant tout (et c’est condamnable) une personne que l’on élie. D’autant que la droite est bien rassemblée et que l’on ne peut pas se permettre de ne pas propulser la gauche au deuxième tour. C’est donc pour l’intérêt général qu’il vous faut vous rassembler. Mais je suis certainement encore dans le délire d’un étudiant en première année qui ne maîtrise pas son sujet et dont les inquiétudes ne résisteront pas à vos arguments.
J’espère avant tout qu’il n’y a rien ici qui vous ait blessé en aucune façon. Pardonnez la relative « véhémence » du ton ainsi que le style répétitif et ironique. Merci infiniment de bien vouloir prendre un peu de votre temps pour répondre à mes interrogations. Et si possible j’aimerais que cela soit vous Olivier. (Vous pouvez me tutoyer, pour ma part c’est la première que je fais un courrier à une personne de cette envergure donc j’ai préféré jouer la carte des règles communément admises).
Respectueuses salutations, Julien.